L'agriculture hors sol : “un moyen d'atteindre l'auto suffisance alimentaire” Adjaratou SANOGO

L'agriculture hors sol, également appelée culture hydroponique ou culture sans sol, est une méthode de culture des plantes sans utiliser de terre. Les racines des plantes sont soutenues par un substrat neutre et inerte et sont nourries par une solution nutritive riche en minéraux essentiels dissous dans l'eau. Au Burkina, une amazone de l'agriculture hors sol se distingue particulièrement des autres. Cette personne n'est rien d'autre que Madame Adjaratou SANOGO, promotrice de l'entreprise Agro business Badouha, fondatrice du Centre international d'incubation de culture nouvelle vision et présidente de l'association pour l'agriculture hors sol au Burkina Faso. La pratique de l'agriculture hors sol présente beaucoup d'avantages. Elle permet de réduire des maladies et des parasites, elle permet un gain de l'espace, et est très rentable. Dans un monde à perpétuel croissance où les hommes accaparent les terres pour se loger et oublient qu'ils doivent se nourrir, l'agriculture hors sol semble être la solution pour nourrir les milliards de bouches dans les prochaines années. Cependant, l'agriculture hors sol nécessite un investissement initial en équipements et une gestion technique plus complexe pour maintenir les conditions optimales pour les plantes. Afin de mieux découvrir comment se pratique l'agriculture hors sol dans un pays comme le Burkina Faso, nous sommes allés à la rencontre de cette spécialiste le 20 juin 2024 dans son champ à Loumbila. 

Loumbila est un département et une commune rurale du Burkina Faso situé à une vingtaine de kilomètres de Ouagadougou dans la province de l’Oubritenga et dans la région du Plateau-Central.

Il est 10h53 lorsque nous arrivons au champ de Mme SANOGO où on peut apercevoir à l'entrée Centre International d'incubation d'agriculture nouvelle vision. À l'intérieur, nous apercevons à l'entrée des maisons et une piscine de poissons. À l'extrême gauche, quelques apprenants venus à l'école du savoir de Mme sont en train de prendre un cours magistral d’un des formateurs. Après quelques heures de patience, la patronne des lieux fait son apparition. Du coup, les quelques élèves qui étaient dehors et les travailleurs accouraient pour la saluer. Des salutations qu'elle répond dans un ton jovial et décomplexé vis-à -vis de ses employés. Selon nos remarques, apparemment tout le monde est ravi de voir la patronne des lieux.

Un aperçu de l'entrée du Centre international d'incubation de culture nouvelle vision 

Après une visite guidée par Mme SANOGO, nous avons été témoin oculaire de ce qui se trouve dans ce centre. Des serres de tomates, de concombre, de gombo, de piment, des bananiers, entre autres. En plus, de l'agriculture, Mme SANOGO associe la pisciculture, l'élevage des volailles, la cuniculture, dans cet espace d’un hectare. S'en est suivi par la suite une séance de questions réponses.

Début : de la restauration à l'agriculture hors sol 

Selon Mme SANOGO, c'est en faisant chaque fois le marché qu'elle a constaté qu'il y avait à certains moments une rupture de légumes. L'idée est venue de comment faire pour qu'il n'y ait plus de rupture. C'est alors qu'elle s'est intéressée à l'agriculture hors sol en décidant de se faire former. 

“ J'ai décidé de me former et le choix est parti sur la culture hors sol grâce à une publication que j'ai vu sur internet”.

Explication de l'agriculture hors sol. La différence avec l'agriculture en sol 

Selon les explications de Adjaratou SANOGO, la culture hors sol est lorsqu'on produit un végétal et jusqu'à la récolte, la plante n'est pas en contact avec le sol.

“On isole une plante et on lui apporte des nutriments. Cette plante ne rentre pas en contact avec le sol”.

Elle est beaucoup pratiquée dans le monde. Cette invention est le fruit des chercheurs depuis le 19e siècle.

“Ils ont étudié les plantes en les isolant et en apportant des nutriments nécessaires. Ils ont vu qu'en les isolant, il y avait plus de résultats quand on produit la culture sur sol. Quand tu fais la production hors sol en respectant les itinéraires et en apportant tout ce que la plante veut, tu auras forcément plus de résultats qu'en sol”.

En général, selon la spécialiste de l'agriculture hors sol, on a plus de résultats que la culture en sol, soit environ 4 fois plus. 

 

“Récemment, dans mes voyages, des formateurs ont voulu montrer une variété de produits en faisant des productions en sol et en hors sol et il n'y a même pas de comparaison avec l'agriculture conventionnelle. Pendant que l'autre est à 50 centimètres malgré les apports nutritionnels, l'autre est à deux mètres cinquante. Par rapport à la variété qu'on a testé, en agriculture hors sol, on peut récolter jusqu'à 10 kilogrammes par pied et en agriculture sur sol, 3 kilogrammes”

         Une serre de concombre 

Les variétés de culture 

D’après Mme SANOGO, le centre utilise un système agro écologique. De ce fait, elle essaie de diversifier les cultures. 

“Nous cultivons la tomate, le piment, le gombo, le concombre, la salade, le haricot vert, le poivron, koumba ( aubergine sauvage), nous cultivons presque tout”

Formations et expériences 

Tout est parti d'une publication sur une formation en agriculture hors sol. Cependant, selon Mme SANOGO, la formation était juste pour quelques heures.  

“J'ai beaucoup aimé et j'ai décidé d'approfondir”

C'est ainsi que la quarantenaire, dans ses recherches et dans l'atteinte de ces objectifs, est rentrée en contact avec un formateur au Bénin et a suivi une formation avec lui. Toujours dans sa quête d'apprendre davantage sur l'agriculture hors sol, Mme SANOGO participait presque à toutes les formations sur l'agriculture hors sol malgré le fait qu'elle avait déjà aménagé son champ et commencé à produire.

“Je participais presque à toutes les formations sur l'agriculture hors sol malgré le fait que j'avais commencé à produire, puisque je maîtrisais. Malgré cela j'ai toujours continué à me former. J'ai fait beaucoup de recherches et je suis devenu un modèle”

En plus des formations, la mère de trois enfants, a engrangé beaucoup de connaissances grâce aux expériences qu'elle réalise dans son champ. 

 “Je fais beaucoup d'expériences dans mon champ et à travers ses expériences, j'acquiers encore des connaissances. Je ne finis jamais d'apprendre et avec les expériences, c'est du concret”

La superficie exploitée 

En plus de son champ d'un hectare. Mme SANOGO est beaucoup sollicitée pour les installations et la suivie des hectares de production.

“Ce qui m'appartient est un hectare. En association, nous avons un demi hectare. Avec les superficies que j'installe chez les gens, je suis la production de beaucoup d'hectares”

Les moyens entrant dans la production de l'agriculture hors sol 

À ce niveau, ce sont les récipients qui font la différence. Les plantes peuvent être produites grâce à du matériel recyclé.

“On peut produire dans des sachets de culture, des pots de culture. Il y a aussi le substrat, actuellement nous utilisons dix modèles de substrats”

Le substrat est ce qui remplace la terre dans les pots. Il se substitue au sol mais il est inerte et neutre. Il n'apporte rien à la plante. 

“Il est inerte car il ne réagit pas quand on met les nutriments. On peut faire le substrat grâce aux fibres de noix de coco, il y a aussi les billes d'argile qui viennent de l'argile qu'on utilise pour faire la poterie, on utilise aussi les coco de bois, les coques d'arachide, les balles de riz torréfié” tels sont les moyens de production utilisés par le centre de Mme SANOGO.

Les conditions de réalisation et environnementales idéales pour l'agriculture hors sol

Dans l’agriculture hors sol, on peut associer ou pas les serres. On peut également faire la culture hors sol sans la serre comme on peut faire la culture en sol sous la serre. Cependant, selon Adjaratou SANOGO, si on associe les cultures hors sol dans les serres, on crée des conditions climatiques favorables. En agriculture hors sol. On a rien à voir avec le sol. Nous arrivons à produire quelque soit l'aridité du sol.

“Dans nos modèles de serres, on fait des files anti UV comme toiture, ensuite on met les ombrières et puis on met les brumisateurs qui pompent la vapeur d'eau dans la serre. Quand ces conditions sont réunies, cela permet à la plante de bien évoluer contrairement à leurs expositions au soleil”

Ensuite, selon la spécialiste, l'agriculture hors sol contribue énormément à protéger l'environnement.

“Dans nos serres nous étalons un tapis avant de déposer nos plantes. Cela protège le sol et nos plantes. Tout ce qu'on utilise en hors sol, pour exemple, les engrais chimiques sont faibles chimiquement. En plus, sur notre site nous sommes plus dans l'agro-écologie. Je pense que si cette méthode est adoptée, on pourra beaucoup diminuer la destruction de l'environnement” a-t-elle indiqué.

Toutefois, comme toute culture, l'agriculture hors sol n'aime pas quand il fait très chaud. En ce moment, selon la spécialiste, il faut créer les conditions favorables pour diminuer la chaleur.

Les types de culture qui se prêtent le mieux à l'agriculture hors sol

À ce niveau, il faut citer le piment, le poivron, le concombre, le haricot, en gros, Mme SANOGO indique qu'il n'y a particulièrement pas de problème avec toutes les autres cultures excepté la tomate. Selon elle, la tomate est capricieuse.

 “Il est difficile de produire la tomate. Mais on a plus de résultats en culture hors sol sous serre qu'en sol. Concernant les autres cultures, à n'importe quel moment nous pouvons les produire”

Une serre de tomate. Une variété de tomate en mode test 

Les techniques utilisées couramment dans l'agriculture hors sol

Les différentes techniques utilisées en culture hors sol sont l’aeroponie, c'est quand on isole les plantes qui sont dans les récipients et on pompe les nutriments et l'air. À ce niveau, on ne parle pas de substrat. Cette technique, selon Mme SANOGO, est la plus rentable et rapide mais également la plus coûteuse. 

Il y a l'aquaponie. C'est lorsqu'on associe la pisciculture aux plantes. 

“Pour exemple, notre bassin est connecté avec les plantes de bananier, de piment. Donc l'irrigation vient de l'eau des poissons”

Une plantation de bananeraie 

Il y a le système NFT. Ce système rejoint un peu l'aquaponie. L'eau va quitter dans un récipient pour cibler les racines des plantes à l'intérieur des PVC.

Il y a aussi la bioponie. C'est lorsque nous sommes en culture hors sol cent pour cent bio. À son niveau, Adjaratou SANOGO indique utiliser l'hydroponie. 

“En ce moment, on utilise des substrats dans des pots et dans des sachets. Ce système est plus développé en Afrique”

Avantages et  inconvénients de chaque type 

L'inconvénient en culture hors sol est le coût. L’aquaponie et le système NFT ne marchent pas trop avec les plantes qui donnent des fruits. 

“Eux, ce sont des feuilles comme de la salade, du persil, les épinards. En deux semaines, tu peux déjà récolter. Pour les fruits, il faut utiliser l'hydroponie. Ou bien l'hydroponie connecté à l'aquaponie” foi de Mme SANOGO.

L'agriculture hors sol et sécurité alimentaire au Burkina Faso 

L'agriculture hors sol peut contribuer énormément à la sécurité alimentaire au Burkina Faso et partout dans le monde. D'après Adjaratou SANOGO, la population augmente rapidement. De ce fait, elle est obligée de se retourner vers les nouvelles méthodes comme l'agriculture hors sol. Ce type d'agriculture nous permet d'utiliser peu d'espace pour plus de rentabilité.

“Plus les gens voudront de l'espace pour se loger moins il y aura d'espace cultivable et de plus en plus la demande sera forte et nous serons obligés de produire assez pour nourrir la population” a-t-elle indiqué. Et à elle d'ajouter, ailleurs, on mène des expériences sur les toits. L'objectif est que chaque ville nourrit sa population. Donc la réponse à cela, il faut l'agriculture hors sol et urbaine, a-t-elle souligné.

“Un chercheur ami m'a dit qu'il sont en train de faire des expériences sur les toits. Ils veulent que chaque ville nourrisse sa population. Donc la réponse à cela, il faut que ça soit l'agriculture hors sol et urbaine”

Mme SANOGO a exprimé son souhait d'installer tous les modèles de l'agriculture hors sol au Burkina Faso qu'elle a vu ailleurs.

               Une serre de piment 

Les difficultés rencontrées 

Selon Mme SANOGO, dans toutes les productions de l'agriculture, on peut avoir de nouvelles maladies. Pendant cette période, tu peux tout perdre avant de maîtriser la production pour la prochaine fois. Nous rencontrons beaucoup ces situations, a-t-elle laissé entendre.

Les contraintes spécifiques liées à l'approvisionnement en ressources

Avant, selon Adja, les gens se consacraient sur ce qu'on leur disait à l'international par rapport au système. Donc, nous étions obligés de faire venir tout de l'étranger. Mais grâce aux expériences que nous avons réalisées ici, nous avons appris qu'on pouvait utiliser beaucoup de choses du Burkina Faso. 

“Actuellement tout ce que nous utilisons est produit au Burkina Faso. Actuellement nous arrivons à nous approvisionner. Il y a une femme de notre association qui fait la production des fibres de coco au Burkina Faso. Ce sont des résultats de longues années. De nos jours, je peux dire qu'on peut faire une production hors sol sans faire venir rien de l'extérieur” a-t-elle précisé.

Les perspectives de développement de l'agriculture hors sol au Burkina Faso

Nombreuses sont les personnes qui adhèrent maintenant à l'agriculture hors sol, a-t-elle fait savoir. Selon elle, dans l'avenir, on aura beaucoup de producteurs et beaucoup de résultats. 

Conseils aux jeunes agriculteurs désirant se lancer dans l'agriculture hors sol

“Il faut être motivé et rigoureux. L'agriculture hors sol demande peu de travail mais beaucoup de technicité et de rigueur. L'itinéraire d'un jour négligé joue sur la production” a-t-elle donné comme conseil.

Comment se former 

Selon la spécialiste de l'agriculture hors sol, il y a beaucoup de centres de formation en agriculture hors sol au Burkina Faso. 

“À notre niveau, nous sommes à Ouagadougou, à Bobo Dioulasso, à Orodara et dans beaucoup d'autres pays dans la sous-région. La formation est disponible en ligne et en présentiel” a-t-elle indiqué.

Pour terminer, l'ancienne restauratrice a indiqué que c'est dans l'agriculture que l'Afrique va se démarquer. Selon elle, l'Afrique a beaucoup de possibilités pour faire l'agriculture par rapport à beaucoup d'autres pays développés. Elle invite la jeunesse et la population en général à retourner à l'agriculture. 

“Dieu merci, nous avons un président qui a des programmes sur l'agriculture. Il faut adhérer surtout aux nouvelles méthodes. L'agriculture est notre part sur la terre” a-t-elle conclu.

Mohamed OUEDRAOGO

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